— par Vincent Favreau
Tout-le-Monde aujourd’hui est un homme heureux. Il s’est rasé sous la douche en repensant à son rêve de la nuit précédente, et à celui qu’il fera la suivante. Il s’est habillé avec sa combinaison grise d’ouvrier, puis a ajusté ses cheveux devant le miroir de la porte. Dehors le vent bruisse dans les feuilles des arbres bordant l’avenue, et le soleil, filtrant à travers le ciel immobile, se colle par plaques sur les trottoirs bitumés. Comme chaque jour il prend son petit déjeuner au café de la station-service : une pleine tasse de café noir avec un sucre et demi, deux oeufs cuits des deux côtés et trois morceaux de bacon, accompagnent un grand verre de jus d’orange fraichement pressé. Il profite de sa pause matinale pour lire le journal. La presse locale contient des articles très intéressants sur la vie des habitants. Les mots-croisés l’occupent jusqu’à dix heures moins le quart.
Tout-le-Monde est un homme seul, aujourd’hui encore il va errer quelques temps dans une grande cité abandonnée, vide. Et nous qui allons l’observer, par le trou d'une serrure, sommes invités à partager ses émotions et ses errances…
[Hazrat Ali a dit : « Qui comprend l'humanité recherche la solitude. »]